Page:Pensées de Gustave Flaubert 1915.djvu/76

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placé que les étoiles. Mais cela n’est pas facile continuellement. Avez-vous remarqué comme nous aimons nos douleurs ?… Mais nous ne valons peut-être quelque chose que par nos souffrances, car elles sont toutes des aspirations. Il y a tant de gens dont la joie est si immonde et l’idéal si borné, que nous devons bénir notre malheur, s’il nous fait plus dignes.

Le malheur de la vie se passe à dire : « il est trop tôt », — puis : « il est trop tard ».

C’est parce que je crois à l’évolution perpétuelle de l’humanité et à ses formes incessantes, que je hais tous les cadres où on veut la fourrer de vive force, toutes les formalités dont on la définit, tous les plans que l’on rêve pour elle. La démocratie n’est pas plus son dernier mot que l’esclavage ne l’a été, que la féodalité ne l’a été, que la monarchie ne l’a été. L’horizon perçu par les yeux humains n’est jamais le rivage, parce qu’au delà de cet horizon il y en a un autre, et toujours ! Ainsi chercher la meilleure des