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Page:Pensées de Gustave Flaubert 1915.djvu/78

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vous remueriez des montagnes » est aussi le principe du beau, ce qui se traduit plus prosaïquement : « Si vous saviez précisément ce que vous voulez dire, vous le diriez bien. » Aussi n’est-il pas très difficile de parler de soi, mais des autres !

Notre âme est une bête féroce ; toujours affamée, il faut la gorger jusqu’à la gueule pour qu’elle ne se jette pas sur nous. Rien n’apaise plus qu’un long travail. L’érudition est chose rafraîchissante. Combien je regrette souvent de n’être pas un savant, et comme j’envie ces calmes existences passées à étudier des pattes de mouches, des étoiles ou des fleurs !

Quand une fois on a baisé un cadavre au front, il vous en reste toujours sur les lèvres quelque chose, une amertume infinie, un arrière-goût de néant que rien n’efface.

Comme nous souffrons par nos affections ! Il n’est pas d’amour qui ne soit parfois aussi lourd à porter qu’une haine !