Page:Pensées de M. Pascal sur la religion, et sur quelques autres sujets, 1669.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
61
M. PASCAL.

vous occupent tout entier.

J’aurois bientoſt quitté ces plaiſirs, dittes vous, ſi j’avois la foy. Et moy je vous dis que vous auriez bientoſt la foy ſi vous aviez quitté ces plaiſirs. Or c’eſt à vous à commencer. Si je pouvois je vous donnerois la foy : je ne le puis, ny par conſequent éprouver la verité de ce que vous dites : mais vous pouvez bien quitter ces plaiſirs, & éprouver ſi ce que je dis eſt vray.

§ Il ne faut pas ſe méconnoiſtre ; nous ſommes corps autant qu’eſprit : & de là vient que l’inſtrument par lequel la perſuaſion ſe fait n’eſt pas la ſeule démonſtration. Combien y a-t’il peu de choſes démonſtrées ? Les preuves ne convainquent que l’eſprit. La couſtume fait nos preuves les plus fortes. Elle incline les ſens qui entraiſnent l’eſprit ſans qu’il y penſe. Qui a démonſtré qu’il ſera demain jour, & que nous mourrons ; & qu’y a-t’il de plus univerſellement crû ? C’eſt donc la couſtume qui nous en perſuade ; c’eſt elle qui fait tant de