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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

pauvre esprit, bien savoir que cela ne t’appartient pas et ne dépend pas de toi[1].

XXXIV

Il t’est toujours permis de couler une vie heureuse et bonne[2], puisque tu peux toujours poursuivre ton chemin, et, tout en fournissant ton chemin, penser et agir. Voici deux points communs entre l’âme de Dieu et celle de l’homme[3] ; en d’autres termes, voici les attributs de l’âme de tout être doué de raison : le premier, c’est de n’être jamais entravée par un autre[4] ; le second, c’est de placer le bien dans la volonté et la pratique de la justice, et de borner là tous ses désirs[5].

  1. Et ne dépend pas de toi. C’est la distinction profonde par où commence le Manuel d’Épictète.
  2. Heureuse et bonne. Il n’y a qu’un mot dans le texte ; mais il présente les deux sens. Il est clair que le stoïcien s’inquiète médiocrement du bonheur dans la vie, et qu’il y recherche avant tout l’accomplissement du devoir.
  3. L’âme de Dieu et celle de l’homme. Voilà la véritable grandeur de l’homme ; et le stoïcisme a raison.
  4. De n’être jamais entravée par un autre. C’est l’indépendance absolue du libre arbitre.
  5. De borner là tous ses désirs. C’est la limite extrême de la vertu humaine ; il ne lui est pas possible d’aller au delà. C’est ainsi que, dans le platonisme, l’idée du bien est la plus haute de toutes les idées.