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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.
paraissent ni un bien ni un mal[1], alors il te sera encore bien plus facile d’être indulgent pour quelqu’un qui n’a que le tort d’avoir de mauvais yeux[2].
XXVII
Ne pense jamais à ce qui te manque comme si déjà tu l’avais[3] ; parmi les choses que tu possèdes, préfère ce qu’il y a de mieux ; en les considérant, remets-toi en mémoire les moyens qui devraient te les procurer[4], si elles venaient à te manquer. Toutefois prends bien garde de ne pas contracter l’habitude de les estimer si haut[5] que, si quel-
- ↑ Ni un bien ni un mal. Par le motif qui a été donné à la fin du § 22, l’offenseur ne peut faire moralement aucun mal à l’offensé ; il n’y a que nous qui puissions nous nuire, en prenant les choses autrement qu’elles ne doivent être prises.
- ↑ Le tort d’avoir de mauvais yeux. Comme un aveugle qui vous heurterait dans votre chemin. Seulement, ici, il est question des yeux de l’esprit.
- ↑ Comme si déjà tu l’avais. Précaution sage, puisque l’objet de nos désirs peut toujours nous manquer.
- ↑ Les moyens qui devraient te les procurer. Il est rare, en effet, que les choses valent, quand on les considère de sang-froid, la peine qu’elles ont coûté. C’est donc un conseil très-pratique que donne ici Marc-Aurèle ; mais il en est de celui-là comme de tant d’autres ; il est fort utile, et aussi fort difficile ; et le désir s’adresse à l’objet qui l’excite bien plutôt que la raison ne regarde aux obstacles.
- ↑ Les estimer si haut. La tranquillité de l’âme, que
ment, on ressent l’offense, et l’on ne réfléchit pas.