En te mettant sans cesse à ce point de vue, tu comprendras que les choses humaines ne sont que fumée et que néant[1]. Tu en seras surtout convaincu, si tu te rappelles en même temps que l’être qui a une fois changé et disparu ne redeviendra jamais ce qu’il a été, dans toute la durée du temps infini. Et toi, dans combien de temps vas-tu changer aussi ? Est-ce qu’il ne te suffit pas d’avoir fourni comme il convient[2] cette courte carrière ? Quelle réalité, quelle chimère[3] peux-tu craindre et fuir encore ? Qu’est-ce, en effet, que tout cela, si ce n’est une suite d’exercices pour la raison, appréciant nettement, et par l’étude exacte de la nature, ce que valent les choses de la vie[4] ? Arrives-en donc avec persévérance à t’assimiler ainsi ces vérités, de même qu’un estomac robuste[5] s’assimile tous les aliments, de même[6]
- ↑ Que fumée et que néant. On a déjà vu des idées et des expressions semblables, liv. II, § 17, et on les retrouvera plus bas, liv. XII, §§ 27 et 33. L’image de la fumée appliquée aux choses de la vie est aussi naturelle que juste.
- ↑ Comme il convient. C’est-à-dire, en accomplissant sans cesse le devoir, sous toutes les formes où il se présente.
- ↑ Quelle réalité, quelle chimère. Le texte n’est peut-être pas aussi précis.
- ↑ Ce que valent les choses de la vie. Il ne faut pas oublier que c’est un empereur qui parle.
- ↑ De même qu’un estomac robuste. Image très-exacte.
- ↑ De même qu’un feu qui brille. Voir plus haut, liv. IV, § 1.
de ses prédécesseurs.