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LIVRE II, § XVII.

se conformer toujours à la raison, et aux lois de la cité la plus auguste et du plus auguste des gouvernements.

XVII

Le temps que dure la vie de l’homme n’est qu’un point[1] ; son être est dans un perpétuel écoulement ; ses sensations ne sont que ténèbres. Son corps composé de tant d’éléments est la proie facile de la corruption ; son âme est un ouragan ; son destin est une énigme obscure ; sa gloire un non-sens. En un mot, tout ce qui regarde le corps est un fleuve qui s’écoule ; tout ce qui regarde l’âme n’est que songe et vanité ; la vie est un combat, et le voyage d’un étranger ; et la seule renommée qui nous attende après nous, c’est l’oubli. Qui peut donc nous diriger au milieu de tant d’écueils ? Il n’y a qu’un seul guide, un seul, c’est la philosophie[2]. Et la philo-

    heureuse, qui, nous assujettissant à Dieu seul, nous rend maîtres de nous-mêmes et de toutes choses ? » Sermon pour la Véture d’une postulante Bernardine.

  1. Le temps que dure la vie de l’homme n’est qu’un point. Ces pensées ont la grandeur de Pascal, sans en avoir l’incurable tristesse. Voir plus loin, liv. III, § x.
  2. Un seul guide, un seul, c’est la philosophie. Magnifique et juste éloge de la philosophie, bien placé dans la bouche d’un tel élève. Sénèque a dit : « Vou-