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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

soudain ce sentiment fit place à une bienveillance que le comte ne s’expliquait pas.

Un matin, le Grand-Chambellan entra chez sa femme une lettre à la main : « Voici, dit-il, une proposition fort originale dont je viens te faire part ; c’est une proposition de madame Séverin Potocka, qui m’exprime le désir de voir François épouser une de ses filles ; jusque-là rien de plus naturel. Mais elle ajoute qu’elle désire non moins vivement voir son fils épouser ta fille Sidonie. » À ces mots, la comtesse tressaillit, ses joues s’empourprèrent et elle ne répondit rien. Le comte s’aperçut de son émotion. « Ce projet te paraît étrange comme à moi, continua-t-il, il serait bizarre de voir nos enfants devenir réellement frère et sœur. » Alors Hélène relevant la tête et regardant fixement son mari : « J’ai un projet plus bizarre encore », dit-elle. « Lequel ? » fit le comte étonné de l’accent singulier de sa femme. « — Celui de les voir devenir mari et femme. » Le comte stupéfait crut un instant qu’Hélène perdait l’esprit. Mais se remettant de son trouble, la comtesse, avec une chaleur et une éloquence entraînantes, expliqua à son mari tous les motifs qui avaient fait naître en elle cette idée, les avantages considérables