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Page:Pergaud-Le Roman de Miraut, 1913.djvu/383

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avec prudence l’odeur humide qui s’exhalait, écoutant ce chant monotone du flot sur les pierres qui l’avait déjà intrigué la veille et l’agaçait peut-être un peu.

Il examinait tout d’un œil soupçonneux ; il aperçut d’autres chiens qui le regardaient avec une curiosité méchante, qui aboyaient dans sa direction et le menaçaient et l’insultaient ; sans doute il ne les craignait guère, surtout avec le maître, mais cela l’ennuya ; il flaira des gens qu’il n’avait jamais senti ni vu ; il aperçut des bois sur lesquels il ne possédait aucune notion. Il se demanda où il trouverait des lièvres et comment il les chasserait et quelles seraient leurs ruses et leurs passages et leurs cantons, et cela lui fit songer à ses chères forêts du pays de Lisée qu’il connaissait mieux que quiconque, hommes et bêtes, dont pas une venelle, pas un passage, pas un fourré ne lui étaient étrangers.

Il pensa que s’il devait vivre ici, il lui faudrait tout recommencer sa vie, apprendre à connaître ses maîtres et leur logis, les gens du pays, les gosses, distinguer les maisons amies des baraques hostiles ; qu’il lui faudrait étudier canton par canton, pouce par pouce tous ces bois, les sonder, les vérifier, les tarauder ; il se dit que cela était vraiment impossible, que sa tête chargée de souvenirs ne pourrait enregistrer ces