Page:Pergaud - De Goupil à Margot, 1910.djvu/98

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silencieusement tombée d’un rameau supérieur, et, se mouvant lentement, Fuseline était descendue à terre.

Vite, vite, car le jour a été long et son estomac est vide, elle suit le chemin coutumier qui l’amène chaque soir : le bout pointu de ses pattes courbes, aux attaches puissantes, frôle à peine la boue grise de neige et de terre détrempée ; sa longue queue touffue se balance légère : elle coupe les sentiers silencieux qui font des barres plus sombres dans la nuit neigeuse ; elle longe les murs d’enclos aux pierres rudes et les haies noires aux chapiteaux blanchâtres, croulants, géantes clepsydres d’où la saison mourante semble s’égoutter ; le sang de l’espoir bat plus fort aux veines de la bête et son désir grandit de la pâture prochaine.

Voici la brèche du mur et les rameaux pourris contre lesquels, comme par mégarde, on a déposé de grosses poutres qui font un unique passage, un étroit canal pour arriver à l’œuf dont la blancheur, ce soir, se détache sur la terre dévêtue de la neige des jours précédents. Elle