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la guerre des boutons


dignité de vieux défenseur de la « Pâtrie » et de représentant de la « loâ ».

Tous les signaux de méfiance et de ralliement étant convenus d’avance, le bois ennemi étant désert, Camus et ses deux acolytes, quand ils jugèrent le moment venu, cessèrent de crier des injures à Bédouin, firent un brusque crochet dans les champs, longèrent en rampant le mur de la pâture à Fricot, rentrèrent dans le bois et, par la tranchée du haut, vinrent déboucher dans les buissons du communal, à une centaine de mètres au-dessus du coude du chemin, c’est-à-dire du champ de bataille.

Il était bien désert à ce moment-là, le champ de bataille, et rien n’y rappelait la lutte épique de l’heure précédente ; mais, dans les buissons du bas, ils entendirent le tirouit des Longevernes qui, régulièrement, les rappelait.

Grâce à leur habile diversion, en effet, la troupe surprise avait pu regagner le camp que gardait Boulot et, à la hâte, dare-dare, remettre chemises, culottes et blousons et souliers. Boulot, affairé, allait de l’un à l’autre, aidant de toutes ses mains, n’ayant pas assez de ses dix doigts pour rentrer les pans de chemises, ajuster les bretelles, boutonner les pantalons, ramasser les casquettes, lacer des cordons de souliers et veiller à ce que personne ne perdît ni n’oubliât rien.