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la guerre des boutons


l’honneur de Longeverne. C’est triste d’y songer ! »

Les yeux, dans la fumée bleue des cigares de clématite, flamboyaient comme les tisons du foyer. Le conteur, très excité, continua :

— Et puis ça n’est pas là toute l’affaire.

« Non, le plus beau de l’histoire et le plus rigolo, ça a été le pèlerinage à la Sainte Vierge de Ranguelle ; Ranguelle… vous savez, c’est la chapelle qui se trouve du côté de Baume, derrière le bois de Vaudrivillers.

« Vous vous rappelez, c’est là que nous sommes allés l’année dernière avec le curé et la vieille Pauline : c’était au moment des z’hannetons ; on en secouait tout le long du bois et on les mettait sur la soutane du « noir » et sur la caule[1] de la vieille. Ils étaient tout fleuris de « cancoines » qui gonflaient leurs ailes pour s’essayer et qui partaient de temps en temps en zonzonnant. C’était bien rigolo.

« Oui, mes amis, eh bien ! un jour du vieux temps, au moment où l’herbe allait devenir bonne à faucher et à rentrer, les Longevernes, conduits par leur cure, s’en sont tous allés, hommes, femmes et enfants, en pèlerinage à la Notre-Dame de Ranguelle demander à la Sainte Vierge qu’elle

  1. Coiffe, bonnet tuyauté.