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LA PARCELLE 32

Il répéta, comme écrasé de chagrin :

— Ce n’est pas moi…, ce n’est pas moi… Mazureau ne comprenait pas ; il se rapprocha d’Éveline.

— C’est Maurice ! dit-elle.

Il eut une sorte de soupir rauque ; le sang lui sauta à la tête. Ses mains s’ouvrirent, montèrent au cou de sa fille. Honoré se précipita.

— Laissez-la, Mazureau, laissez-la !

Le vieux les repoussa tous les deux. Ses poings se levèrent plusieurs fois, énormes, martelant le vide. Et puis il se dressa de toute sa taille au milieu de sa maison.

— Va-t’en ! jeta-t-il d’une voix hautaine. Fille sans nom, tu n’es plus de ma famille ! Que je ne te revoie jamais sous mon toit ! Va-t’en !

Éveline passa derrière lui et sortit ; on l’entendit traverser sa chambre et courir par le jardin.

Honoré tremblait, la figure décomposée. À la fin, il tira son portefeuille.

— Ma parole est engagée envers vous, dit-il timidement. Je vous avais promis sept mille francs, je vous les apporte. Les voici : prenez-les quand même.

D’un grand geste orgueilleux, Mazureau repoussa l’argent.

— Entre nous, il n’est plus d’alliance possible… Et tant que j’aurai ma raison, je ne tendrai pas la main vers les étrangers, comme un mendiant.

— Je ne suis pas un étranger, murmura Honoré ; votre malheur est le mien.

Le vieux se redressa encore, les yeux durs.

— Qui t’a parlé de mon malheur ! Je suis encore debout !… J’ai toujours vécu seul, sans appui