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LA PARCELLE 32

À vrai dire, cela allongeait leur route. Il leur fallait faire maintenant tout le chemin qu’ils s’étaient épargné en passant par la traverse. Piquant droit au milieu des emblavures, ils furent en dix minutes aux Brûlons.

L’endroit qu’ils appelaient ainsi était un petit coteau penchant doucement vers l’est en bordure de la route de Quérelles.

Au sommet se trouvait un cimetière de famille, clos, de trois côtés seulement, par un mur assez élevé et par une haie de laurier-tin ; du côté du levant où était l’entrée, il n’y avait pour toute clôture qu’un buisson nain d’épines noires.

Dans ce pays — autrefois âprement protestant — on en voyait partout, de ces petits cimetières.

Beaucoup de gens gardaient leurs morts tout près d’eux, derrière leur maison, au fond d’un jardin ; d’autres les conduisaient à la sortie du village, dans quelque petit coin ensoleillé ; quelques uns, enfin, les menaient dormir au beau milieu de la plaine.

Le cimetière communal n’était peuplé que par de rares familles catholiques ; parfois, cependant, on y enterrait des ouvriers, des valets, des étrangers, petites gens sans orgueil et sans fortune, qui n’ayant jamais rien possédé de leur vivant, allaient se coucher pour toujours dans la terre banale.

Au sommet des Brûlons, dormaient les Mazureau. Ils étaient là chez eux ; la terre qui les entourait était leur terre, celle sur laquelle ils s’étaient tous penchés pour le même effort obstiné.

— Vois-tu, petit, c’est ici ma place quand je serai mort…, rappelle-toi !… Ici, c’est ta pauvre