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LA PARCELLE 32

— Il faut se plaindre en justice ! criait-il.

— Je ne le veux pas, dit Éveline.

Honoré, lui, passait, à la Commanderie, les plus tristes jours de sa triste vie.

Il ne travaillait plus, ne dormait plus, ne mangeait plus et son corps, chétif, s’amenuisait.

Lorsqu’il avait commencé à tourner autour d’Éveline, cinq mois plus tôt, la fille lui plaisait certes ! et il l’avait choisie entre d’autres sans trop balancer, mais enfin il avait alors son bon sens intact et, s’il eût perdu d’un coup tout espoir, il n’eût point perdu en même temps le boire et le manger.

De marchandage en marchandage avec Mazureau, de galanterie en galanterie avec Éveline, d’espoirs en désillusions, il avait fait du chemin. A moitié sincère d’abord, quand il tâchait à endormir la fille avec des phrases câlines de vieil amoureux bien disant, il s’était peu à peu animé à ce jeu ; et maintenant pour cet homme sage de quarante ans, il n’y avait plus au monde qu’Éveline…

Quand il apprit brutalement la vérité, le coup lui fut si dur qu’il s’effondra.

Pendant plusieurs jours, on ne le vit pas. Il resta chez lui, dans quelque recoin de ses grandes bâtisses, à ruminer son chagrin. Et il parlait seul comme un innocent dont l’esprit voyage.

— Ce n’est pas possible !… Qu’elle s’en aille ! Qu’elle s’en aille bien loin !… Les belles ne manquent pas sur la terre !

Parfois il murmurait :

— Si elle était veuve…, une supposition…, je l’épouserais bien !