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LA PARCELLE 32

naire en bleu de guerre et, au premier rang, assises aux tables d’écoliers, quatre femmes en coiffe plate.

Sur l’estrade du maître d’école, M. Boureau étalait ses papiers et préparait ses bougies. Un avoué était venu de la ville ; un très bel avoué il faut le dire, avec son lorgnon d’or, ses gants clairs et sa vareuse d’officier de l’arrière.

Il était accoudé à l’estrade et il avait l’air de s’amuser beaucoup à considérer ces paysans.

Avisant un petit vieillard modeste qui se tenait dans un coin, l’air craintif, il lui tendit une affiche d’un air goguenard.

— Tenez, mon petit père, cela vous donnera l’idée de mettre enchère !

— Ben honnête ! mais je ne sais point lire…, et pis je n’ai plus d’argent.

— Allons donc ! une boisselée ou deux, ce n’est pas le diable. Il y a bien encore quelques écus dans votre bas de laine.

— J’ai acheté, le mois dernier, mon bon monsieur…, la terre de Benauge et aussi le logis…, cent quatre-vingt mille francs…

— Cent quatre…

— Oui, mon bon fi ! avec les frais, ça va loin !

L’avoué alla s’asseoir et ne bougea plus. Le notaire riait sous cape, le nez dans ses paperasses.

— Premier lot…, mise à prix : trois mille francs ! Enchères de vingt francs !… Premier feu ! deuxième feu…, troisième et dernier feu !…

Personne ne dit mot. Le notaire ne s’émut pas. Le deuxième lot, sur mise à prix de deux mille huit cents, ne trouva pas non plus d’acquéreur. Des voix s’élevèrent dans le fond de la salle.