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LA PARCELLE 32

— Il me faut, à moi, peu de chose pour vivre ; je ne suis pas plus dépensier qu’un pauvre. Mais si vous m’aimiez comme je vous aime, une grande joie me viendrait de la fortune que m’ont laissée mes anciens ; elle serait à vous, vous en profiteriez selon votre bon plaisir… Quand la guerre sera finie, il y aura encore du bonheur sur la terre ; il y aura place pour la gaieté, pour les fêtes et les divertissements de jeunesse. Vous seriez heureuse entre toutes et, entre toutes, considérée.

Elle retira sa main qu’il tenait toujours. Alors, il demanda franchement :

— Je ne vous plais pas, Éveline ?

— Non !

Malgré elle, le mot lui avait échappé, tout vif.

Il recula un peu, la tête basse.

— Je suis peut-être trop vieux à vos yeux ? Le cœur n’a point d’âge, croyez-le… Avec moi, votre vie serait sûre ; dites-moi seulement que vous réfléchirez !

— Vous me tourmentez, dit-elle ; vous me faites passer tout mon temps ; il faut que j’aille…

— Je ne vous tourmenterai plus, Éveline ; je ne reviendrai plus chez vous, car vous tenez à ce que je m’éloigne.

Elle hésita une seconde et puis elle répondit :

— Je ne vous en veux pas, soyez-en sûr ; vous pouvez revenir chez nous.

— Non ! vous revoir tous les jours me serait cruel. Tout à l’heure, je vais retrouver votre père ; il doit passer chez moi en revenant de Quérelles. Je lui dirai qu’il ne m’est plus possible d’entrer en sa maison à cause de vous qui me repoussez… Je travaillerai pour lui s’il le veut ; il peut me le