Page:Perochon - La Parcelle 32.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
59
LA PARCELLE 32

— Elle a été un peu surprise, je pense… C’est une fille sage qui veut réfléchir. Il n’eût pas été de mon goût qu’elle me répondît à la légère comme une évaporée dont la tête tourne au premier vent.

Mazureau fronça les sourcils.

— Enfin, a-t-elle dit oui, a-t-elle dit non ?

— Elle m’a dit de revenir, et c’est ma joie ! répondit Honoré.

Mazureau lui tendit la main.

— C’est la mienne aussi, dit-il.

Ils se séparèrent, ayant chacun leur folie en tête.

Pendant ce temps, Éveline écrivait à Maurice. C’était d’une fille sans fierté ce qu’elle faisait là.

Toute raison partie, elle l’appelait à son aide, le suppliait de ne pas l’abandonner, de lui donner de ses nouvelles au moins ! Elle étalait la détresse de son cœur. Elle écrivait humblement :

Je ne demande qu’un mot de temps en temps pour me donner du courage. Nuit et jour, je suis en tourment pour toi dont la vie est en danger. Il n’y a personne ici pour me parler de toi ; personne ne me dira jamais si tu es vivant, seulement ! Au pays, il y a des gens qui vivent comme si la guerre n’était pas et qui sont durs et qui sont rusés… Maurice, il y a des gens dont j’ai peur et je n’ai personne pour m’aimer et pour me soutenir…

Elle était si émue qu’elle n’entendit pas son père qui arrivait. Quand elle leva la tête, il était trop tard : Mazureau se dressait sur le seuil.

Il s’avança vers elle sans hâte, prit la lettre, la regarda et la mit dans sa poche. Puis il saisit