Page:Perochon - Nene.djvu/57

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à leurs jeux que ses mains dont la peau était dure et presque insensible.

Le soleil tapait tout droit ; les deux tas de gerbes étaient comme les cloisons d’un corridor surchauffé ; toute cette paille craquait, trop dorée, trop sèche, trop chaude. Le dormeur haletait, accablé par cette atmosphère de fournaise.

— Nom de Bleu !

Il venait de se réveiller d’une brusque secousse nerveuse. Et il ne s’étirait pas, les yeux tout de suite larges.

— Nom de Bleu ! c’est bête, tout de même !

Il murmurait, de fâcheuse humeur, la bouche sèche et amère.

Chaque fois qu’il faisait mérienne, c’était la même chose… Est-ce qu’il ne pourrait donc plus jamais se défendre des rêves ? Est-ce qu’il ne pourrait plus jamais dormir d’un bon sommeil d’homme tranquille et las ?

Il n’était pas plutôt étendu sur la terre qu’une étrange douceur coulait en ses veines.

C’étaient d’abord des formes vagues qui passaient dans sa vue, des êtres et des choses qu’il n’aurait pas su nommer, des rondes diaboliques de jolies fadettes, des sarabandes dont le vent lui fouettait la figure et le grisait d’une odeur abominable et chaude. Enfin il « voyait » ! Et non pas tantôt ceci, tantôt cela : il voyait toujours des yeux très bleus, profonds comme le péché, et puis une pâleur qui prenait forme, qui devenait une gorge de femme, une gorge d’amoureuse, palpitante, gonflée, élargie,