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Page:Perrault - Contes des fées, 1886.djvu/70

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CONTES DES FÉES.

fermée. La curiosité lui fit mettre l’œil à la serrure. Mais que devint-il en apercevant la princesse si belle et si richement vêtue, qu’à son air noble et modeste il la prit pour une divinité ! L’impétuosité du sentiment qu’il éprouva dans ce moment l’aurait porté à enfoncer la porte, sans le respect que lui inspira cette ravissante personne.

Il sortit avec peine de cette petite allée sombre et obscure, mais ce fut pour s’informer qui était la personne qui demeurait dans cette petite chambre. On lui répondit que c’était un souillon qu’on nommait Peau d’Âne, à cause de la peau dont elle s’habillait, et qu’elle était si sale et si crasseuse que personne ne la regardait ni ne lui parlait, et qu’on ne l’avait prise que par pitié pour garder les moutons et les dindons.

Le prince, peu satisfait de cet éclaircissement, vit bien que ces gens grossiers n’en savaient pas davantage et qu’il était inutile de les questionner. Il revint au palais du roi son père plus amoureux qu’on ne peut dire, ayant continuellement devant les yeux la belle image de cette divinité qu’il avait vue par le trou de la serrure. Il se repentit de n’avoir pas heurté à la porte, et se promit bien de n’y pas manquer une autre fois. Mais l’agitation de son sang, causée par l’ardeur de son amour, lui donna dans la même nuit une