Page:Perrin - À la surface des choses, physique générale, Tome 6, L'énergie, 1941.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
12
l’énergie


4. Le frottement suffirait pour classer les températures. — Considérons les états successifs que prend une substance donnée, disons du mercure, à mesure que sa température s’élève. Chaque propriété de la substance, disons la densité, varie généralement alors toujours dans le même sens. Des exceptions se présentent pourtant (par exemple, pour l’eau, d’abord prise à la température de la glace fondante, et qu’on échauffe graduellement, la densité grandit, passe par un maximum, puis décroît).

Je veux faire observer que, pour une propriété au moins, la variation reste toujours de même sens : quand un objet est plus chaud qu’un autre, la variation qu’il y détermine par conductibilité ou par radiation pourrait toujours être obtenue en y dépensant du travail par frottement. On peut donc, réciproquement, de façon peut-être moins instructive, mais plus rapide, classer par ce seul moyen les températures en se bornant à dire, selon une règle qui ne comporte ni exceptions, ni contradictions :


Un corps est plus chaud qu’un autre s’il y détermine par contact ou rayonnement un changement qui pourrait y être produit par frottement[1].


5. Graduation des températures. — Nous allons maintenant « numéroter » les températures, faisant correspondre à chacune d’elles un nombre défini, qui sera « fonction » de la réalité physique « température ».

En principe, la loi de cette correspondance est arbitraire. Mais les conventions suivantes s’imposent :

D’abord, le nombre qui repère une température doit être d’autant plus grand que cette température est plus élevée ; c’est une fonction « croissante ».

Ensuite, cette fonction croissante doit être continue, en sorte que deux températures très voisines soient repérées par deux nombres très voisins.

Enfin, sans pouvoir encore mieux préciser, nous voudrons que des nombres franchement différents correspondent à des tempé-

  1. Comme nous comprendrons bientôt, cela signifie que, de deux corps inégalement chauds, le plus chaud est celui qui cède de « l’énergie » à l’autre.