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DE JULIE


j’eus tout lieu de juger, à leur entretien, de son bon goût dans le choix de ses amis. On joua, on s’amusa, et on ne se quitta que fort satisfaits les uns des autres. Elle vint deux jours après chez moi ; nous passâmes la journée ensemble, et je ne négligeai rien de ce qui pouvait lui faire connaître le goût infini que j’avais pour elle. Nous nous fréquentâmes régulièrement par la suite ; il fallut être des parties de bastide qu’on liait assez souvent : c’est la mode en Provence. Sa connaissance enfin nous en procura beaucoup d’autres. Madame Renaudé était femme d’un capitaine de vaisseau, dont les absences continuelles lui laissaient la facilité d’avoir un ami ; rien n’est moins scandaleux à Marseille : la régularité de la conduite ne s’y établit que sur le plus ou le moins de changement qu’on observe dans ses habitudes. M. Morand, avec lequel elle était pour lors arrangée, était un homme d’un certain âge, plus fait pour l’amitié que pour l’amour, et dont le caractère droit et sincère ne se démentait jamais : aimant d’ailleurs le plaisir, plus jaloux cependant d’en procurer que d’en prendre ; simple dans ses manières, serviable, exact à ses affaires, réglé dans ses amusements, ayant plus de bon sens que d’esprit ; plaisant par lui-même, ne cherchant point à le paraître ; et c’est

  
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