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DE JULIE


des Mirlitons : on ne travaille plus comme cela aujourd’hui. Avez-vous une de ces roulades qui vaille cette chute de mirlitons don don ? Voilà ce qu’on appelle la nature : don don, c’est admirable ! Moi je donnerais cent Rossignols pour un Mirliton. Ma bonne parente ne savait où mettre ses mains d’aise : les allures, ni les flons flons ne lui avaient jamais tant procuré de plaisir, et je puis dire en toute sûreté qu’on n’avait depuis longtemps si bien fêté son Mirliton. Nous allions infailliblement rivaliser, si à son tour le mien ne lui eût fait perdre l’équilibre. Je le lui chantai, et le ravis tout ensemble : à peine l’eus-je fini qu’il m’offrit de me présenter à l’Opéra ; cette babiole, à son avis était l’infaillible essai du mérite d’une actrice. Le reste de la soirée se passa en éloges infinis, qu’il ne pouvait cesser de répéter. Je saisis ce moment pour rappeler encore Labrie, au sujet duquel il me sacrifia son ressentiment, en jurant contre la canaille qui n’avait point de goût. Quelques autres attentions me firent juger qu’il avait le vin tendre, et que les plaisirs de la musique ne lui faisaient point négliger les devoirs de l’amour, qui était le sujet de notre partie : il était à tout, et si sa galanterie n’avait pas cette finesse recherchée, du moins ne pouvait-on lui refuser la force de l’expression. La nuit vint enfin précipiter notre retraite ; on