Page:Perrin - Notice sur les travaux scientifiques de Jean Perrin, 1923.djvu/68

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on juxtapose aisément sous le microscope une plage brillamment fluorescente et une plage sombre que limite le contour de la première illumination.

J'ai de même observé la destruction de toutes les substances organiques fluorescentes que j'ai étudiées. J'indique dans le Tableau suivant les plus remarquables, avec leur couleur de fluorescence, et le solvant employé[1].

CORPS FLUORESCENT COULEUR DE FLUORESCENCE SOLVANT

Uranine……………………… vert glycérine (ou eau).
Fluorescéine neutre…………. vert, puis bleu id.
Phénosafranine……………… jaune d'or, puis vert franc id.
Morin……………………….. vert malachite id.
Chlorophylle………………... rouge sang alcool.
Esculine (alcaline)………….. bleu de ciel glycérine.
Quinine (divers sels)………... bleu de ciel eau ou glycérine.
Bleu de méthylène………….. rouge sang glycérine.
Tournesol (alcalin)………….. rouge brique id.
Bleu fluorescent…………….. rouge éclatant id.
Rose de Magdala……………. orange éclatant alcool et glycérine.
Anthracène………………….. Indigo violet xylol.

La teneur en matière fluorescente était généralement de l’ordre du dix-millième. La durée nécessaire pour produire un assombrissement franc de la zone fluorescente variait, suivant le corps, de quelques secondes (tournesol) à quelques minutes (rose de Magdala).

La destruction peut s'opérer par échelons, la première substance fluorescente disparaissant pour faire place à une deuxième substance également fluorescente, qui disparaît à son tour. C'est ainsi que la fluorescence, d'abord franchement jaune, de la phénosafranine, disparaît en quelques secondes, laissant une plage de fluorescence verte, tenace, qui exige plusieurs minutes pour s'assombrir. Un faible déplacement latéral de la préparation permet de juxtaposer aisément sous le microscope, en contraste vif, une plage jaune et une plage verte.

Les variations de température et de viscosité paraissent sans grande influence sur ces fluorescences de corps organiques. Excitée de même, l'uranine luit de même dans l'eau bouillante ou dans l'eau froide, ou dans la glycérine refroidie dans l'air liquide,

  1. Plusieurs des corps énumérés dans ce Tableau sont des matières colorantes bien connues. Dès que l'on sait qu'ils sont détruits par la lumière avec émission de fluorescence, il semble difficile de n’être pas tenté de généraliser ce résultat aux colorations si nombreuses dont on dit qu'elles « passent » à la lumière. On supposera du même coup que cette destruction s'accompagne de fluorescence (visible ou invisible). La vérification reste à faire.