Aller au contenu

Page:Pert - Charlette.djvu/14

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

visage rond au menton court, au teint de pêche velouté de fin duvet, de taille au-dessous de la moyenne, frêle et mignonne, Charlette paraissait à peine ses dix-sept ans frais éclos. Toute sa beauté résidait en ses grands yeux fauves aux pupilles ex-trêmement mobiles, tantôt points imperceptibles dans la prunelle claire, ou emplissant tout l’iris de leur noir insondable : yeux de gaîté, de souffrance, de passion, de sensibilité ou de colère farouche ; énigme et révélation de cette âme d’enfant dont la vie de femme allait commencer vraiment ce jour-là.

— Augustin, je te dis que sûrement nous approchons !… Je te le jure, je reconnais tout !… Ici, tiens, je suis passée avec maman un jour qu’il pleuvait, et, tout à l’heure, cette église, c’était celle où on a baptisé ce petit enfant, une fois où je portais une robe bleue… Oui, oui, nous arrivons !…

— Dame, à la fin, c’est à présumer, observa Augustin philosophiquement, en balançant son étrange petite tête ridée et trouée de marques de variole au-dessus de son corps ramassé et trapu.

Ancien ordonnance de feu le général Lemarday, le grand-père de Charlette du Jonquier, le brave garçon avait sauvé la vie de son chefen 1870, transportant au travers de la mitraille l’officier évanoui, blessé grièvement, le soignant ensuite et le cachant des ennemis au péril de ses jours. Depuis lors, il avait en quelque sorte fait partie de la famille, ayant