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Page:Pert - L Autel.djvu/118

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orientale — opposant à cette rare fougue amoureuse la sensualité mystique de son verbe d’illuminé.

Et à sa voix, il joignait le geste sournois et calculé, auquel elle obéissait.

Tout à coup, réveillé de son étrange rêve, Robert sursauta, plein de rage, devant l’enlacement du comédien et de la comédienne. Celle-ci enveloppait de ses deux bras la taille de celui qu’elle implorait ; et sa tête, son épaule, sa joue, presque ses lèvres s’appuyaient étroitement à la chair nue de l’homme dont le sein dé. couvert impudiquement offrait aux regards une auréole brune, comme meurtrie par les baisers, dans la matité blanche de l’épiderme.

— Mady ! cria Castély. Savez-vous qu’il est minuit passé !…

Madeleine dénoua aussitôt son étreinte, cessa le cou- plet qu’elle murmurait, recula, eut un geste de lassitude extrême, et, de sa voix ordinaire, seulement un peu voilée, elle dit :

— Oui… assez pour ce soir, n’est-ce pas ?

Caula rabattit lentement la draperie qui l’enveloppait.

— Si vous voulez.

Le front dans sa main, Joseph-Pol de La Boustière restait plongé dans un songe. Robert s’écria un peu trop haut :

— Mais, Mady, rhabillez-vous donc !…

De Caula eut un sourire ironique retroussant ses lèvres sur ses dents, et le dévisagea :

— Rien ne presse tant que cela, j’imagine !…

Maintenant, Mady parlait avec volubilité, vantant la pièce de La Boustière, dans laquelle chaque jour elle découvrait des beautés insoupçonnées jusqu’alors. Peu à peu conquis, rasséréné, Joseph-Pol laissa s’épanouir