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Page:Pert - L Autel.djvu/54

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légère hésitation, que Robert perçut, étreint par une affreuse angoisse, sentant tout craquer. Mais, à ce moment, Mady s’inclinant, posa doucement sa longue main étroite, dégantée, sur la manche du gros homme, en prononçant quelques mots intelligibles pour lui seul.

Le visage de Joseph-Pol s’illumina ; il sourit béatement, et acquiesça, enfin, à ce que Lombez recommençait à solliciter, plus impérieusement. Celui-ci inclina la tête pour dissimuler la grimace radieuse de sa face, referma le bloc-notes d’un geste vainqueur et le plongea dans l’intérieur de sa redingote.

— C’est fait ! pensa Robert.

Un flot de pensées, d’aspirations, d’effrois, de remords, d’espoirs fous s’agitait en lui, l’étourdissait. Jamais il n’avait senti en lui un bonheur aussi intense mêlé à tant de rage, d’inexprimable colère contre Mady, contre Lombez, contre lui-même.

En bas, une autre scène convenue se déroulait, ramenant encore une avidité aux entours de la proie convoitée.

Maurice Sallus, ce grand beau garçon, bretteur redouté, l’ami intéressé et cynique de tant d’actrices et de demi-mondaines, qui afferme un haut prix la critique dramatique du grand quotidien le Paris-Jour, et s’en fait un revenu triple, grâce à ce qu’il extorque aux directeurs, auteurs et artistes, pour faire un « loyal » compte rendu des pièces, Maurice Sallus, après avoir reconduit jusqu’à la porte de la salle une jeune femme très élégante, revenait d’un pas nonchalant vers Mady, que son regard insultant et froid de maquignon de chair féminine, déshabillait machinalement. Elle s’était levée, empressée ; tous deux causèrent pendant quelques instants. Elle parut vouloir ramener Sallus vers ses com-