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Page:Pert - L Autel.djvu/59

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il a posé ses griffes… Il vaut mieux nourrir un appétit qu’essayer de rassasier cent insatiables…

Un revirement subit se fit en Castély ; sa figure s’éclaira, il eut un rire jeune.

— Mady, je suis tout de même bien content !…

Inconsciemment, il s’était exprimé avec l’accent enfantin, câlin qu’il réservait d’ordinaire pour Suzanne.

Madeleine le regarda, surprise et touchée : les femmes adorent chez certains hommes ces retombées juvéniles. Elle s’abandonna sincère.

— Moi aussi, Castély…

Et leurs yeux émus se marièrent longuement, ainsi que, dans un embrassement passionné. Bien qu’ils ne songeassent à rien de précisément voluptueux, tout vibrait en eux. Ils se sentaient à la fois brisés et électrisés ; ils avaient le trouble spécial des minutes qui précèdent les grandes explosions d’amour.

Madeleine se ressaisit la première. Consultant avec inquiétude la pendule placée au fond de la salle

— Sept heures et demie ! s’écria-t-elle. Il faut que je rentre !… Je dîne en ville… un cachet chez des gens charmants…

— Moi, l’on m’attend chez moi, murmura Robert, la pensée à moitié ramenée vers Suzanne, vers les soucis de son ménage, et s’y dérobant avec une fatigue involontaire.

Machinalement, il avait tiré son porte-monnaie pour régler. Il eut une soudaine contrariété, examinant la multitude des tasses vides et les débris de la dînette.

— C’est que… j’ai oublié… Je suis sorti de chez moi presque sans argent..

Madeleine s’indigna.

— C’est vrai, mon pauvre Castély, ils se sont défilés !… Cet imbécile de La Boustière était trop bouleversé