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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/108

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Elle répliqua effrontément, posa sa main sur la bedaine de son père :

— Parle pour toi !… Dieu que tu es gros, aujourd’hui… Qu’est-ce que tu as donc mangé ?… Hein, mieux qu’à la maison, je parie ?…

Le député fit la grimace.

— Ah ! le fait est que les repas, chez nous !…

Et, se tournant, vers Mlle Lavernière :

— Je ne sais à quoi cela tient… Nous dépensons pourtant beaucoup… Clémence est bonne cuisinière, puisque, lorsque nous avons du monde, ses dîners sont irréprochables… Eh bien ! à l’ordinaire, c’est infect… Et insuffisant, avec cela !…

Cady rit.

— Pardi, c’est bien simple !… C’est la gratte !… Si elle te donnait à manger, Clémence n’économiserait pas de quoi entretenir son fils à Saint-Cyr.

— Comment, ma cuisinière a un fils à Saint-Cyr ?

— Parfaitement !… Un joli garçon, qui a de petites moustaches noires, de petites joues roses… On en mangerait !

M. Darquet fit un grand geste, et, sans doute par inadvertance, sa main retomba derrière Mlle Lavernière, reposant sur la hanche de celle-ci.

— Écoutez, mademoiselle, déclara-t-il d’une voix empâtée, après une large bouffée tirée de son cigare. Je représente à la Chambre les idées socialistes et je m’en fais gloire…

Cady trépigna :

— Écoutez !… écoutez !… À l’ordre !… Très bien !… C’est idiot !… Bravo !… Vous êtes un crétin !…

— Cady ! Veux-tu te taire et tenir tranquille !… Tu es insupportable !…

— Mais, papa, tu prononces des phrases de tribune… Alors, je fais les « mouvements divers ».

Et, se laissant aller à l’impulsion de l’auto, qui virait à grande vitesse, elle se coucha sur son père, qu’elle embrassa.