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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/137

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À sa voix, Mme Darquet tressaillit, comme désagréablement rappelée à elle.

Eh bien ! mais, fit-elle avec une lueur d’emportement, que t’importe ?… Ce sont des gens que tu ne connais pas.

— Ils sont morts, dites ?

Les yeux attachés sur les photographies qu’elle tenait entre ses doigts comme les feuilles d’un éventail, Mme Darquet, retombée dans sa rêverie, répondit d’une voix distraite :

— Morts ?… Non, pas tous… Moi, d’abord, je suis là… Puis, Marguerite et son mari… il est général à présent… Les de Laferre ont marié dernièrement leur fille… Marcel Tadieu est substitut dans le Midi, je crois…

Cady s’était glissée derrière le fauteuil de sa mère. Elle se pencha, désignant le jeune homme au livre.

— Et celui-ci ? prononça-t-elle si bas que Mme Darquet ne remarqua point l’altération de sa voix.

Tous les papiers s’échappèrent des doigts de celle-ci, sauf celui où l’inconnu se profilait attentif et mélancolique, absorbé dans sa lecture.

Elle répondit comme si elle se fût parlé à elle- même, du reste, sans trouble apparent, bien que, pour qui la connaissait, son attitude, son accent, son regard fussent tout autres qu’à son ordinaire :

— Celui-ci. Oui, il est mort.

Cady soupira avec effort, la respiration coupée.

— Il est mort ? Qui est-ce ? Je ne l’ai jamais vu, et cependant je le connais.

Mme Darquet se redressa subitement.

— Quelle stupidité dis-tu, Cady ! s’écria-t-elle sèchement, la voix vibrante. Tu ne peux le connaître, car il est mort avant ta naissance !

— Ah !

Et, insistante :

— Qui est-ce ?

Mme Darquet laissa retomber le portrait sur ses