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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/187

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— Tenez, le gosse que voici… C’est peut-être la plus fichue amitié que vous pouvez avoir… Ça sort de nourrice et c’est déjà pourri… Ça a le vice dans le sang…

Cady s’impatienta brusquement.

— Ah ! laissez-moi donc tranquille !… Si Georges est comme il est, est-ce que c’est sa faute ?… Et si je suis comme je suis, est-ce ma faute aussi ?

Et soudain elle se leva de table et alla se jeter dans le grand fauteuil, toute ramassée sur elle-même, le visage caché dans ses mains, secouée de sanglots.

— Pauvre mioche ! murmura Émile, navré, avec l’envie de prendre l’enfant pleurante dans ses bras, de la câliner tendrement, et retenu par la conviction que ce ne serait pas convenable de sa part.

La marque de sympathie que l’homme n’osait lui accorder lui vint d’un animal. Le chat gris, après avoir dévoré la carcasse du poulet, au grand dommage du parquet, s’était livré ensuite à une toilette minutieuse ; puis, il avait rôdé autour de Cady, guettant l’instant favorable pour regagner son giron. Le désespoir de sa nouvelle amie l’émotionna et lui fit oublier toutes ses instinctives précautions. D’un bond, il fut sur les genoux de la fillette, et, s’allongeant, il appuya ses deux pattes de devant sur la poitrine de Cady, fixant son regard intelligent sur le visage humain contracté par le chagrin qui l’intéressait passionnément.

Elle tressaillit sous le léger contact, écarta ses mains, vit le geste expressif de la bête, et cette pitié qu’elle inspirait inonda son cœur esseulé d’une chaude reconnaissance.

— Oh ! minet… minet ! balbutia-t-elle en recommençant à pleurer, ses bras enveloppant l’animal et serrant contre elle avec une tendresse émue ce petit corps vivant, tout tressaillant d’affection spontanée.