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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/27

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lations de cheveux d’un assez vilain roux artificiel. Son regard était froid et perçant ; elle gardait une grande beauté, malgré ses quarante-six ans, et son aspect annonçait bien la femme de tête qu’elle était.

Enfant unique de riches manufacturiers de la Sambre, elle avait été mariée très jeune à un noble, officier de cavalerie, viveur et joueur, qui avait dissipé sa dot. Devenue veuve à vingt-cinq ans, à la suite d’un duel malheureux pour son mari, Noémi de Bellocq rentra dans sa famille, à jamais guérie de l’envie de figurer parmi l’aristocratie qui avait ébloui sa première jeunesse.

Pendant huit ans, elle mena joyeuse vie à Nancy ; sa réputation ne fut pas sans recevoir quelques accrocs ; mais sa grande beauté et sa grosse fortune lui conservaient de sérieux et fidèles prétendants.

Ayant dépassé la trentaine, Noémi songea à l’avenir, se décida à se remarier, et se résolut à épouser un homme politique, afin de remplacer les joies de la galanterie par celles de l’ambition.

Elle jeta son dévolu sur un homme à peu près inconnu et qu’elle pourrait créer selon ses désirs. Il avait un an de plus qu’elle, se nommait Cyprien Darquet et était avocat, sans le sou, mais non pas sans talent.

C’était le fils, selon la loi, d’un brave homme d’avoué qui passait pour la buse la plus invétérée du département ; mais Noémi avait confiance, la chronique scandaleuse donnant à Cyprien pour véritable père le sénateur Le Moël, un noceur roublard, grand brasseur d’affaires, qui avait su amasser sans ennui de nombreux millions.

Allié par sa femme à tous les personnages influents de la contrée, Cyprien avait aisément enlevé son élection à la Chambre. Depuis onze ans, il représentait la Sambre, sous l’étiquette socialiste.

L’union de ces deux personnages était heureuse. Si la fidélité du député paraissait douteuse, ce dont sa