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Page:Pert - La Petite Cady.djvu/95

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finie d’un fond imprécis, la tête troublante de Cady, aux yeux lumineux, à la bouche arquée de mystérieuse mélancolie, à la chair mate, d’une vie impressionnante, tandis que se dessinait, en une sorte de hardi et insouciant croquis, le svelte corps habillé de gris, assis de face et renversé sur un canapé, les jambes emprisonnées de soie noire transparente croisée haut. Dans une ombre audacieuse, l’on devinait sans l’apercevoir la chair nue de la cuisse, au-dessus du bas haut tiré.

Sur un autre chevalet, un tableau destiné à la vente, également avancé, bien qu’un personnage central demeurât à peine tracé, représentait une scène de danse chez un roi d’Égypte.

De la danseuse, sujet principal, on ne voyait que l’esquisse vague d’un dos cambré, d’un profil perdu, de bras soulevant des voiles qui plaquaient sur les formes des jambes…

Cady, debout devant ce dernier tableau, l’examinait attentivement.

— C’est très joli, déclara-t-elle convaincue.

Laumière, occupé à préparer sa palette, sourit.

— Je parie, jeune fille, que vous préférez cette toile à votre portrait ?

Elle répondit sans hésitation, avec, sous la simplicité des termes, une justesse de sens artistique qui surprit le peintre :

— Ça n’a aucun rapport. Ceci est plus joli, et l’autre est plus beau.

— Enfin, lequel aimez-vous le mieux ?

— Cela dépendrait du salon où je le mettrais.

Et, comme Laumière riait, elle expliqua avec irritation :

— C’est vrai !… Ce tableau d’Égypte fera bien dans un salon de genre ancien, avec des tentures riches, un peu sombres… Et mon portrait y serait affreux… Il lui faut autour de lui de l’art nouveau, du blanc, du clair, du plein jour…