Page:Petit - Memoires et Lettres galantes de madame Du Noyer.djvu/103

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public un badinage que nous n’avions établi que pour notre plaisir : je ne puis même m’empêcher de vous représenter que vous avez un très grand tort de n’avoir pas masqué les personnages dont elles sont remplies. Je ne puis même comprendre l’intention que vous avez eue de faire imprimer toutes ces bagatelles. Pour moi, je vous l’avoue, je ne serais jamais si hardie. J’aurais toujours, quoique femme, présent à mes yeux ce fameux Boileau, dont en pareil cas les épaules furent cruellement affligées. Dans quelque pays, dans quelque État du monde où je me trouverais, je ne serais jamais sans appréhension. Je veux croire, Madame, que celui que vous habitez jouit d’une grande liberté, qu’on y est à couvert de la vengeance de ses ennemis. Il me semble même que vous n’avez pas eu sujet de vous louer des personnes de votre nation et religion. Je m’étonne fort qu’une personne de votre mérite n’ait pas fait plus d’impression sur leur esprit ; ils auront sans doute été jaloux de vos belles qualités ; peut-être n’auront-ils pas été contents de vous avoir vu postuler des pensions, lorsqu’ils auront appris l’abondance dans laquelle M. du Noyer a pris soin de publier que vous étiez partie. Au surplus, Madame, ce n’est pas à moi d’examiner les motifs que vous avez eu, aussi bien que ceux qui vous ont engagée, de mettre au jour tous ces ouvrages. Mon intention n’est pas de les critiquer. Celle que j’ai, est de vous marquer le sensible plaisir que je ressens de vous avoir recouvrée, et, si la vérité de vos disgrâces se trouve telle que vous la dépeignez dans vos mémoires et que ceux de M. du Noyer ne se trouvent pas justes, vous m’obligerez infiniment de vous servir de moi comme de vous-même. »

Puis, sur cette mercuriale, reprenant leurs anciennes habitudes, elle lui fait le récit de diverses aventures.