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[1652] MÉMOIRES

y étoit aussi), il dit qu’il ne pouvoit comprendre que l’on eût mis la tête du cardinal à prix ; et que si on s’en vouloit défaire, qu’il n’étoit point besoin de promettre cinquante mille écus à celui qui le tueroit, et qu’il avoit dans son armée plus de mille hommes qui l’entreprendroient pour un patagon : mais qu’il n’étoit pas venu à Paris pour être un meurtrier et un bourreau, et qu’il n’avoit dessein que de servir M. d’Orléans, et non pas M. le prince, qui lui retenoit une partie de ses États, dans lesquels il avoit envie de rentrer. Ensuite on lui dit que son armée faisoit de grands ravages partout où elle passoit, et même au lieu où elle étoit campée sur la rivière de Seine ; il en demeura d’accord, et dit que ses gens avoient été très-long-temps dans un pays ruiné, où ils ne trouvoient rien pour vivre, et que c’étoit ce qui étoit cause que se trouvant à cette heure dans un pays fort gras, et où ils trouvoient toutes les choses nécessaires à la vie, ils se saisissoient de tout, de peur de retomber dans la nécessité où ils s’étoient vus, laquelle avoit été telle qu’ils avoient été plus de quinze jours sans manger de pain. Sur cela on lui demanda comment ils pouvoient vivre quinze jours sans pain. Il répondit qu’ils ne mangeoient pas seulement tous les chiens de l’armée et tous les chevaux qui mouroient, mais qu’ils avoient aussi mangé plus de dix mille hommes : qu’entre autres ses soldats ayant un jour attrapé deux religieuses, ils les mirent incontinent par pièces, et en firent du potage, qu’ils mangèrent avec la chair de ces religieuses dès qu’il fut cuit ; qu’un de ses officiers ayant été blessé

    Lor-, depuis duc d’Elbœuf, comte de Rieux du vivant de son père. Il le perdit le 5 novembre 1657.