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SUR VILLE-HARDOUIN

sion, sortit de l’accablement où le plongeoit sa maladie. Aussitôt qu’il le vit ses forces semblèrent renaître, sa jeune épouse crut qu’une heureuse crise s’étoit opérée en lui, et qu’il étoit sauvé ; il se leva, demanda des chevaux, dit qu’il vouloit prendre l’air de la campagne, et fit en effet une promenade assez longue, pendant laquelle Ville-Hardouin l’entretint de tous les projets qu’on avoit formés. En rentrant il se sentit plus mal : cet effort l’avoit épuisé, et il ne pensa plus qu’à faire ses dernières dispositions. Par son ordre, tous les chevaliers qui devoient le suivre à la croisade furent assemblés autour de son lit : il leur distribua l’argent qu’il avoit destiné à l’entreprise, et exigea d’eux le serment qu’ils joindroient l’armée à Venise. Tous le prêtèrent en pleurant. Après leur avoir fait les adieux les plus tendres, il expira dans les bras de Blanche et de Ville-Hardouin.

La jeune veuve n’avoit qu’une fille et se croyoit enceinte. Ville-Hardouin fut chargé par elle de faire tous les arrangemens de famille que la mort du comte rendoit nécessaires. La conduite de Henri avoit donné, comme on l’a vu, beaucoup d’ombrage à Philippe-Auguste, et ce prince prévoyant vouloit se délivrer de toute inquiétude du côté de la Champagne. Il craignoit que Blanche, en contractant un second mariage, ne rallumât les troubles qu’il avoit eu tant de peine à étouffer. Il exigea donc des garanties certaines de la part d’une princesse qui ne pensoit qu’à pleurer son époux. Les conférences eurent lieu à Sens ; Ville-Hardouin défendit les droits de Blanche, et voici les points principaux du traité qui fut conclu : on convint que la comtesse mettroit sa fille sous la garde