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SUR VILLE-HARDOUIN

Après ce défi, qui fut regardé par les Grecs comme une déclaration de guerre, Murtzuphle, devenu premier ministre d’Alexis, essaya, mais en vain, de brûler la flotte des Vénitiens. Le jeune Empereur, désespéré de ce que cette tentative, qui devoit porter un coup mortel à l’armée des Croisés, n’eût pas réussi, effrayé de la vengeance qu’ils pourroient en tirer, résolut à tout prix de les fléchir. Il chargea le traître Murtzuphle d’aller leur porter ses excuses, et de leur dire qu’il s’étoit trouvé contraint par le peuple en fureur à faire cet acte d’hostilité, dont il avoit été loin de désirer le succès. Murtzuphle, profitant pour ses desseins secrets de la terreur de son maître, eut l’air de se charger volontiers de cette mission. Il se rendit près des chefs de l’armée, feignit de sentir la justice de leurs griefs, et leur opposa seulement les dispositions d’une multitude égarée. Pour aplanir toutes les difficultés, il leur proposa de les introduire de nuit dans la ville, et de leur livrer le palais de Blaquernes ainsi que les principaux postes, d’où ils pourroient facilement contenir les séditieux Il les quitta en leur donnant des otages qu’il avoit choisis parmi leurs partisans.

Murtzuphle, avant de remplir cette mission, en avoit révélé le secret aux principaux chefs du peuple. Il n’en fallut pas plus pour porter à son comble la haine qu’ils avoient déjà pour Alexis. Une insurrection générale éclate au retour du ministre, et de toutes parts on demande un autre empereur. L’historien Nicétas, revêtu alors d’une des premières charges de l’Empire, distingué par sa prudence et sa modération, cherche à calmer les séditieux ; il leur repré-