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NOTICE

paroissoient destinés à partager les suffrages : c’étoient Baudouin, comte de Flandre, Boniface, marquis de Montferrat, et, Henri Dandolo, doge de Venise. Baudouin, âgé de trente-deux ans, joignoit à de grands talens militaires les vertus les plus solides : il avoit constamment donné l’exemple d’une piété et d’une modération aussi dignes d’amour que d’estime : plein de douceur et de bonté dans les habitudes ordinaires de la vie, il devenoit terrible dans les combats, et sa témérité l’emportoit alors au-delà des bornes que la prudence devoit lui prescrire. C’étoit là son unique défaut ; mais dans ce temps de chevalerie on préféroit un tel défaut à la vertu qui lui est opposée. Le marquis de Montferrat, à peu près du même âge, avoit joui jusqu’alors d’une grande influence dans l’armée dont il étoit presque regardé comme le général en chef. C’étoit lui qui avoit été chargé de soumettre au jeune Alexis la partie la plus importante de l’Empire : expédition couronnée par le plus heureux succès, et qui lui avoit fait beaucoup d’honneur. Allié à la famille impériale par ses deux frères aînés, qui, ayant épousé des princesses grecques, avoient été honorés du titre de César, il étoit plus habitué que tout autre général aux mœurs du peuple conquis, et paroissoit plus capable de le gouverner ; mais son caractère étoit moins aimable que celui de Baudouin, et d’autres raisons l’éloignoient du trône. Nous avons assez fait connoître le doge de Venise par ses actions : cet homme extraordinaire, uniquement occupé des intérêts de sa patrie, commença par déclarer qu’il ne voulait point de l’Empire.

Sa vaste prévoyance, perçant dans l’avenir, lui fit