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DE SAINT LOYS.

que ung grant maistre en sainte theologie estoit venu à lui, pour parler et soy conseiller à lui. Et quant il deult dire son cas, il se print à pleurer tres-fort. Et l’evesque lui dist : « Maistre, ne pleurez point, et ne vous desconfortez ; car nul ne peut estre si grant pecheur que Dieu ne soit plus puissant de lui pardonner. Ha ! dist le maistre, sachez, monseigneur l’evesque, que je n’en puis mais si je pleure ; car j’ay grant paeur de estre mescreant pour ung point : c’est que je ne puis bonnement estre asseuré ou saint Sacrement de l’autel, ainsi que sainte Eglise l’enseigne et commande à croire, dont mon cueur ne peut estre asseuré ; et croy, fist le maistre, que ce me vient de temptation de l’ennemy. Maistre, lui dist l’evesque, or me dittes : Quant l’ennemy vous envoie telle temptation, et vous met en telle erreur, ce vous plaist-il point ? Dist le maistre : Certainement nenny ; mais au contraire me desplaist et ennuye tant que plus ne pourroit estre. Or je vous demande, fist l’evesque, si vous prandriez or, ne argent, ne aucun bien mondain, pour regnier de vostre bouche riens qui touchast au saint Sacrement de l’autel, ny à aucun des saints Sacrements de l’Eglise ? Vraiement, fist le maistre, soiez certain que nulle chose terrienne n’est que j’en voulsisse avoir prinse[1] : ainçois aymerois-je mieulx que l’on me desmembrast tout vif, membre à membre, que avoir regnié le moindre desdiz saints Sacremens. » Adonques l’evesque lui remonstra par

  1. Soiez certain que nulle chose terrienne n’est que j’en voulsisse avoir prinse : soyez certain que, pour toute chose au monde, je ne voudrois avoir perdu cette croyance.