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de saint loys.

nous serions tantoust tuez et occis. » Adonc je me fis lever, pour ce que j’estois malade, et prins m’espée toute nue, et leur dis que je les turoie s’ilz tiroient plus avant à me vouloir mener à terre aux Sarrazins. Et ilz me vont respondre, qu’ilz ne me sauroient passer oultre : et pour ce, que advisasse lequel j’amois le mieulx, ou qu’ilz me menassent à rive, ou qu’ilz m’encrassent en la riviere. Et j’aymé mieux, dont bien me print ainsi que vous orrez, qu’il m’encrassent ou fleuve, que qu’ilz me menassent à rive, où je veoie noz gens tuer ; et ainsi me crurent. Mais ne tarda gueres, que tantoust veez-cy venir vers nous quatre des gallées du Souldan, esquelles avoit dix mil hommes. Lors je appellé mes chevaliers, et requis qu’ilz me conseillassent de ce qu’estoit de faire, ou de nous rendre aux gallées du Souldan qui venoient, ou de nous aller rendre à ceulz qui estoient à terre. Et fusmes tous d’un accord qu’il valoit mieulx se rendre à ceulx des gallées qui venoient, par ce qu’ilz nous tiendroient tous ensemble : que de nous rendre aux autres, qui estoient en terre, qui nous eussent tous séparez les ungs d’avecques les autres, et nous eussent par adventure venduz aux Beduins dont je vous ay devant parlé. A ce conseil ne se voulst mye consentir ung mien clerc que j’avoie, més disoit que tous nous devions laisser tuer, affin d’aler en paradis. Ce que ne voulusmes croire ; car la paeurs de la mort nous pressoit trop fort.

Quant je viz, qu’il estoit force de me rendre, je pris ung petit coffret que j’avoie, où estoient mes joyaulx et mes reliques, et gecté tout dedans le fleuve. Et me dist l’un de mes mariniers, que si je