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histoire

sa demande telle, et dist : « Sire, il est bien vray que madame ma mere, qui cy est presente, me tient en bail[1], et m’y tiendra encore jusques à quatre ans. Parquoy elle joist de toutes mes chouses, et n’ay puissance encores de riens faire. Toutesfoiz, si me semble-il qu’elle ne doit mye lesser perdre ne dechoirs ma terre, et le vous ; car ma cité d’Antioche se pert entre ses mains. Pourtant, Sire, je vous supply humblement que le lui vueillez remonstrer, et faire tant qu’elle me baille deniers et gens, affin que je aille secourir mes gens qui sont dedans ma cité, ainsi qu’elle le doit bien faire.» Aprés que le Roy eut entendu la demande que le prince faisoit, il fist et pourchassa tant à sa mere, qu’elle lui bailla grans deniers. Et s’en alla le prince d’Antioche à sa cité, là où il fist merveilles. Et dés lors, pour l’onneur du Roy, il escartela ses armes, qui sont vermeilles, avecques les armes de France.

Et pour ce que bonne chouse est à racompter et reduire à memoire les faitz et vertuz d’aucun excellant prince, pourtant icy parlerons du bon conte de Japhe messire Gautier de Brienne, lequel en son temps et vivant, et à grant force de faitz d’armes et de chevallerie, tint la conté de Japhe par plusieurs années, lui estant assailly des Egipciens, et sans ce qu’il joist d’aucun revenu, mais seulement de ce qu’il povoit gaigner és courses qu’il faisoit sur les Sarrazins et ennemys de la foy chrestienne. Et advint par une foiz qu’il desconfit une grant quantité de Sarrazins qui menoient grant foeson de draps de soie de diverses

  1. Me tient en bail : me tient en tutèle.