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ANCIENS MÉMOIRES

et d’attendre là les Anglois de pied ferme[1], et qu’il se promettoit de donner pour étrene au nouveau roy de France le captal de Bue en personne, en qualité de prisonnier de guerre. Tandis qu’il tenoit ce discours, les Anglois étoient postez sur la montagne en fort belle ordonnance, et faisoient montre de leurs drapeaux et de leurs enseignes avec beaucoup de faste et de fierté.

Le captal ne sçavoit quel party prendre ; il s’imaginoit que les François, ne bougeans de leurs places, apprehendoient de risquer le combat. Ce fut dans cette pensée qu’il voulut pressentir les officiers de son armée, pour sçavoir s’il n’étoit point à propos de descendre pour aller aux François et les attaquer, tandis qu’ils étoient tous saisis de crainte et de peur. Mais Pierre de Squanville le fit revenir de ce sentiment, en luy témoignant qu’il étoit dangereux de faire descendre ses troupes, qui, ne pouvans faire ce mouvement sans beaucoup fatiguer, donneroient beaucoup de prise sur elles, quand il faudroit en venir aux mains ; qu’il valoit donc bien mieux ne pas abandonner la montagne, jusqu’à ce que les François eussent pris un autre party. Jean Joüel goûta fort la pensée de ce chevalier, soutenant que s’ils gardoient encore ce poste trois jours, les François seroient afiamez dans le leur et seroient obligez de décamper dans peu. Cet avis étoit si judicieux que Bertrand s’appercevant que c’étoit là le but des Anglois, assembla le conseil de

  1. « Attendons icy, dist Berlian, noz ennemiz à pié, jusques à tant qu’ilz soient à nous venuz. Je donne au Roy nostre sire à son estraine de sa noble royaulté celui que on appelle le captal. » (Ménard, p. 101.)