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SUR DU GUESCLIN.

Bertrand et toute sa compagnie blanche, ayant glorieusement exécuté ce qu’ils avoient entrepris en faveur d’Henry, tinrent conseil ensemble, dans la pensée de tourner leurs armes du côté de Grenade, contre les Sarazins qui s’en étoient rendus les maîtres. Mais Henry voyant que ce dessein nuiroit beaucoup à ses affaires, qui demeureroient imparfaites, et pouroient tomber en decadence s’il étoit abandonné d’eux, les conjura de suivre leurs premières brisées, et de pousser toûjours leur pointe contre les États de Pierre, comme ils avoient si bien commencé, leur representant que si c’étoit un motif de religion qui leur faisoit porter leurs pensées contre le royaume de Grenade, parce qu’il étoit remply de Juifs et de Sarazins, qu’il n’y en avoit pas moins dans les terres de l’obeïssance de Pierre, qui leur pouroient servir d’objet à l’accomplissement de leurs pieux desseins ; qu’au reste il leur abandonneroit les dépoüilles de toutes les conquêtes qu’ils feroient, dont ils pouroient s’enrichir beaucoup.

Tandis qu’Henry faisoit les dernières instances auprés d’eux pour leur persuader de ne le pas abandonner en si beau chemin, la Reine vint appuyer tout ce qu’il disoit, en ajoutant les larmes aux prieres, et leur remontrant que, s’il leur plaisoit de rester avec eux, elle sacrifieroit toutes choses pour reconnoître les bons services qu’ils leur auroient rendus ; qu’ils n’auroient pas plûtôt les talons tournez, que Pierre viendroit fondre sur eux et reprendre Burgos. Elle les cajola si bien, que le Besque de Vilaines, également touché de son discours et de ses pleurs, declara qu’il avoit toûjours ouy dire que ce n’étoit