Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/378

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
373
SUR DU GUESCLIN.

persuadans que la grande amour qu’il avoit pour elle ne luy auroit pas permis de luy faire mystere de rien. Cette dame leur dit froidement qu’elle croyoit que les approches d’Henry l’obligeroient d’aller bientôt en Portugal. En effet, Pierre prit la resolution de quiter Seville dés le lendemain, sur l’avis qu’il avoit reçu de la juifve, qu’on en vouloit encore plus à sa personne qu’à la ville. Il fit donc trousser son bagage en grande diligence, et fit le même compliment à ceux de Seville que celuy qu’il avoit fait aux habitans de Burgos, de Tolede et de Cardonne, les conjurant de se bien defendre contre Henry jusqu’à son retour, qui seroit bien prompt, puis qu’il ne partoit que pour aller demander du secours aux rois de Grenade et de Belmarin, leur promettant de revenir incessamment, et de fondre, avec toutes ces forces, sur son frère, sur Bertrand et sur toutes leurs troupes, et que si l’un et l’autre tomboient dans ses mains, il ne leur feroit aucun quartier. Les bourgeois de Seville luy firent aussi les mêmes protestations de fidelité que les autres villes, et le prierent de les venir au plûtôt animer par sa présence à soutenir le choc de leurs communs ennemis.

La belle juifve, qui s’étoit trouvée présente à la conjuration que Turquant avoit tramée contre Pierre, quand il entra dans la juifverie pour débaucher ceux de cette nation du service de ce prince, remarqua ceux qui luy paroissoient les plus mal intentionnez pour luy, dont elle luy donna la liste par écrit. Pierre voulant s’en venger, feignit d’avoir besoin de leur cortège sur sa route, leur disant, pour les endormir et les engager à le suivre, qu’il les avoit toûjours reconnu