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particulière, pour la multitude des autres qui tiennent les esprits occupés, le grand-maître de Malte eut crainte qu’il obtînt du Roi ce qu’il désiroit, et envoya une ambassade solennelle en France pour remontrer au Roi l’injustice de cette demande.

Il représenta à Sa Majesté que cet ordre étoit depuis cent vingt ans annexé au leur ; que, si Sa Majesté favorisoit en cela le duc de Nevers, les ordres militaires d’Espagne et d’Italie renouvelleroient leurs poursuites anciennes, pour leur ôter semblablement les biens du Saint-Sépulcre qu’ils possèdent en leurs terres ; que, bien que l’offre que faisoit le duc de Nevers fût sincère, ce qu’il ne croyoit pas néanmoins qui fût à l’avenir, qu’il se contentât du seul titre de sa grande-maîtrise dudit ordre, sans rien prétendre aux biens qui en sont unis à Saint-Jean de Jérusalem, cela n’étoit pas raisonnable, vu qu’elle fait partie de la dignité de leur grand-maître, à la conservation de laquelle Sa Majesté a intérêt, vu que des sept langues qui composent le corps de l’ordre de Malte, trois sont françaises, et la plupart des grands-maîtres sont de leur nation ; et que non-seulement le grand-maître en recevroit diminution en sa dignité, mais tout l’ordre y seroit intéressé, en ce que la noblesse française ayant un grand-maître dans le royaume, auquel elle se pourroit engager de vœu, même sans exercice de la guerre, aimeroit mieux prendre cette condition que d’aller à Malte avec tant de difficulté et de dépense ; dont ils voient l’expérience en l’ordre Teutonique, qui avoit ruiné la langue allemande, autrefois la plus belle des sept ; joint qu’il ne seroit peut-être pas expédient au service du Roi qu’un prince, son