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éloigner. Toutes lesquelles choses étant, c’eût été à la Reine une aussi grande imprudence de s’y fier, que c’étoit à lui une grande indiscrétion de le lui conseiller.

Cependant le trouble et l’étonnement de l’arrêt de M. le prince ne fut pas plutôt cessé que le maréchal d’Ancre revint à la cour. S’il en étoit parti avec un grand désespoir, il n’y revint pas avec une moindre présomption et espérance de recommencer à gouverner pis que jamais. Sa femme étoit si abattue de l’effroi où elle s’étoit trouvée, duquel nous avons parlé ci-devant, et de son humeur mélancolique que cette crainte avoit irritée, qu’elle en étoit en quelque manière sortie hors de son bon sens, ne sortant plus de sa chambre, et ne voulant voir personne, croyant que tous ceux qui la regardoient l’ensorceloient, et elle avoit étendu ce soupçon jusques à la personne de Barbin, qu’elle avoit pour ce sujet prié de ne la plus aller voir.

Le maréchal, à son arrivée, demanda audit Barbin s’il y n’auroit plus de danger qu’il se mêlât des affaires. L’autre, qui savoit qu’il étoit déjà résolu de faire ce qu’il lui demandoit, et qu’il ne s’en abstiendroit pas, quoi qu’il lui conseillât, mais prendrait sujet de croire que l’ambition le porteroit à lui donner ce conseil, lui dit que à son avis il le pouvoit faire, et qu’il ne voyoit point de raison qui l’en dût empêcher. Mais cela, néanmoins, fut l’entrée de sa ruine, ce qui le confirma en la haine de tout le monde, et donna un des principaux moyens à Luynes de médire de lui à la Reine et au Roi, et préparer l’orage que nous verrons tomber sur sa personne l’année sui-.