Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/101

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de l’abandonner à ces mutins, disant qu’il ne craignoit rien, qu’il étoit impossible qu’on le pût convaincre d’aucune faute, et qu’il prenoit sur lui le soin de sa justification. Le Roi, trop foible, fait ce que ce généreux ministre lui conseille, et le laisse mettre en prison dans la tour de Londres. Dès qu’il y fut, ses ennemis le chargèrent de calomnies et de crimes. On fut long-temps qu’on l’amenoit tous les jours au parlement pour être interrogé. Il répondit sur tous les articles de ses accusations avec tant de liberté d’esprit, tant de vigueur et de fermeté, que ses propres ennemis en demeuroient confondus ; et pour peu que ceux qui l’écoutoient fussent indifférens, ils devenoient aussitôt ses partisans. Il étoit laid, mais assez agréable de sa personne ; et la Reine, me contant toutes ces choses, s’arrêta pour me dire qu’il avoit les plus belles mains du monde. Le Roi et la Reine faisaient tout leur possible pour le tirer de l’état où il étoit : ils employoient toutes leurs créatures, ils offroient toutes les charges du royaume aux plus mutins ; mais toute leur application n’y servit de rien. Ces esprits factieux étoient touchés du désir de la liberté : ils vouloient abaisser l’autorité royale, et voyoient clairement qu’ils n’y pourroient jamais réussir, tant que leur Roi seroit servi par un habile et fidèle ministre. La Reine, pendant cet intervalle, travailloit à le sauver ; elle ne passoit point de jours sans avoir des rendez-vous avec les plus méchans, qu’elle faisoit venir par de petits escaliers dérobés dans l’appartement d’une de ses dames qui étoit proche du sien, et qui étoit à la campagne. Elle seule, avec un flambeau à la main, sans se vouloir confier à personne, les alloit trouver les soirs, et