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menu peuple de la ville. Elle leur parla vigoureusement, elle usa de prières douces et humbles, et n’oublia rien à leur dire de tout ce qui pouvoit les animer à prendre sa défense. Elle se servit de la haine publique du Mazarin, et leur représenta qu’il leur seroit glorieux s’ils vouloient mander au Roi qu’ils lui ouvriroient les portes, pourvu qu’il ne voulût point l’amener avec lui. Eux, qui aimoient leur repos et qui n’avoient nulle inquiétude du gouvernement du Mazarin, à qui ils aimoient autant obéir qu’à un autre, répondirent fort naturellement qu’ils étoient serviteurs du Roi, et qu’il n’étoit pas juste de lui ôter la liberté de se servir de qui bon lui sembleroit. Ils déclarèrent à cette princesse que leur résolution étoit d’envoyer vers Leurs Majestés les assurer de leur fidélité, et mandèrent au Roi qu’il seroit toujours le maître de leur ville quand il lui plairoit d’y venir. Madame de Longueville, se trouvant sans ressource, vit toutes ses espérances évanouies ; mais son grand cœur ne l’ayant pas abandonnée, elle pensa tout de bon à se sauver. Elle fit alors une confession générale qui parut avoir toutes les marques d’une véritable contrition ; et quoiqu’elle conservât le dessein de faire la guerre, elle n’en eut point assez de scrupule, parce qu’elle crut alors, en flattant sa passion, que la défense étoit permise.

Quand cette princesse se vit pressée par Le Plessis-Bellière, qui la menaçoit d’assiéger le château où elle étoit, elle sortit par une petite porte de derrière qui n’étoit pas gardée. Elle fut suivie de ses femmes, de celles qui eurent le courage de ne la pas quitter, et de quelques gentilshommes. Elle alla deux lieues à pied