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DU CARDINAL DE RETZ.

La Meilleraye, avoit une estime particulière pour sa valeur. Vous pouvez croire que nous faisions souvent ensemble le panégyrique du cardinal, et des invectives contre la foiblesse de Monsieur, qui, après avoir engagé M. le comte à sortir du royaume et à se retirer à Sedan, sous la parole qu’il lui donna de l’y venir joindre, étoit revenu de Blois honteusement à la cour.

Comme j’étois aussi plein des sentimens que je viens de vous marquer, que La Rochepot l’étoit de ceux que l’état de sa maison et de sa personne lui devoient donner, nous entrâmes aisément dans les mêmes pensées, qui furent de nous servir de la foiblesse de Monsieur pour exécuter ce que la hardiesse de ses domestiques fut sur le point de lui faire exécuter à Corbie, dont il faut, pour plus d’éclaircissement, vous entretenir un moment.

Les ennemis étant entrés en Picardie l’année 1636, sous le commandement de M. le prince Thomas de Savoie[1] et de Piccolomini, le Roi y alla en personne, et y mena Monsieur son frère pour général de son armée, et M. le comte pour lieutenant général. Ils étoient l’un et l’autre très-mal avec M. le cardinal de Richelieu, qui ne leur donna cet emploi que par la pure nécessité des affaires, et parce que les Espagnols, qui menaçoient le cœur du royaume, avoient déjà pris Corbie, La Capelle et Le Catelet. Aussitôt qu’ils se furent retirés dans les Pays-Bas et que le Roi eut repris Corbie, l’on ne douta point que l’on ne cherchât les moyens de perdre M. le comte, qui avoit

  1. Thomas-François de Savoie, prince de Carignan, fils de Charles-Emmanuel, duc de Savoir, mort en 1656. (A. E.)