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MÉMOIRES

gner des gens dans Paris ; l’on me donna un ordre pour toucher de l’argent et pour l’employer à cet effet ; et je revins de Sedan, chargé de plus de lettres qu’il n’en falloit pour faire le procès à deux cents hommes.

Comme je ne pouvois pas me reprocher de n’avoir pas parlé à M. le comte dans ses véritables intérêts, qui n’étoient point assurément d’entreprendre une affaire dont il n’étoit pas capable, je crus que j’avois toute la liberté de songer à ce qui étoit des miens, que je trouvois même sensiblement dans cette guerre. Je haïssois ma profession plus que jamais : j’y avois été jeté d’abord par l’entêtement de mes proches ; le destin m’y avoit retenu par toutes les chaînes et du plaisir et du devoir : je m’y trouvois et m’y sentois lié d’une manière à laquelle je ne voyois plus d’issue. J’avois vingt-cinq ans passés, et je concevois aisément que cet âge étoit bien avancé pour commencer à porter le mousquet. Ce qui me faisoit le plus de peine étoit la réflexion que je faisois, qu’il y avoit eu des momens dans lesquels j’avois, par un trop grand attachement à mes plaisirs, serré moi-même les chaînes par lesquelles il sembloit que la fortune eût pris plaisir de m’attacher malgré moi à l’Église. Jugez, par l’état où ces pensées me devoient mettre, de la satisfaction que je trouvois dans une occasion qui me donnoit lieu d’espérer que je pourrois trouver dans cet embarras une issue non-seulement honnête, mais illustre ! Je pensai aux moyens de me distinguer : je les imaginai, je les suivis. Vous conviendrez qu’il n’y eut que la destinée qui rompit mes mesures.

Messieurs les maréchaux de Vitry[1] et de Bassom-

  1. Nicolas de l’Hôpital, duc de Vitry, mort en 1644, le 28 sept. (A. E.)